Le pays d’Auvergne est en proie aux vents successifs qui drapent les maisons comme des écharpes. C’est décembre avec ses lueurs cuivrées et ses nuages sans contours. L’année s’achève au son des cloches carillonnant Noël. Les vieux paysans lissent leurs moustaches couleur d’herbe sèche. Ils savent qu’il faut encore du temps pour atteindre les beaux jours, même si ceux-ci commencent à rallonger.
Denise prépare les fêtes de fin d’année. Comme d’habitude, il y aura du monde à la maison. C’est l’effervescence. Morphée, la Husky, profite d’un moment d’inattention pour s’introduire dans le poulailler et tuer un gros canard de Barbarie, gentil et pacifique. Les autres volatiles se cachent dans les fourrés. Mais la femelle canard, la jolie CACA, a été blessée et s’est réfugiée dans un clapier pour échapper à la mort.
Chez Denise, tous les animaux sont de compagnie à part entière. Poules, lapins, canards ne terminent jamais leur existence à la cocotte. Ils ont droit aux égards et soins qu’ils méritent. Cela fait deux fois que la Caca est attaquée par un chien. Confiée par un voisin, c’est dans un piteux état que Denise a déjà récupéré et soigné la belle, il y a quelques années.
La blessure sous l’aile est énorme, profonde, sanguinolente et probablement fort douloureuse. Installée à l’abri de tous les dangers, au chaud dans la véranda, la Caca a droit aux antidouleurs et aux antibiotiques. Tous les jours, la plaie est désinfectée et l’animal pansé. Pendant deux semaines, la Caca, enserrée dans de grosses bandes Velpeau, à tout l’air d’un poilu de la guerre de 14.
La Caca cicatrise bien. Elle perd patience sous la véranda et regagne l’enclos des volailles. Signe de guérison totale, elle se remet à pondre. Mais elle s’ennuie sans son gros canard de Barbarie qu’elle aimait tant. Alors, pour que la Caca garde le moral, chacun se met en quête d’un nouveau compagnon pour elle. Mais pas de mâle en vue ! Ce sera donc une belle canette toute blanche qui partagera gîte et couvert avec la rescapée. Les deux copines s’entendent à merveille et ne se quittent plus. Longue vie aux deux petites cacas.
Danielle Chevalier
Villejaleix
28 mars 2018
Texte écrit suite au récit
conté par Denise Thealler


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