NONO entend un remuement sous les rames des fayards qui s’en vont en file le long des prés. Elle cesse de lisser son pelage désordonné et s’immobilise. Un lièvre sort des ronces, l’œil effaré. Il s’enfonce dans la broussaille et disparaît.
Nono boude. Elle n’aime pas qu’on la dérange pour rien. Ce jour d’avril est trop beau, trop calme, plein de cris de mésanges. Le monde semble s’endormir comme une vieille personne. Nono hume la terre chaude, l’odeur qui s’élève, si verte, de l’herbe fraîche. Elle reprend sa toilette interrompue. Elle n’est pas compliquée, Nono, mais c’est une chatte de caractère, qui sait ce qu’elle veut et ce qu’elle ne veut pas. Ses oreilles frémissent à l’affût des sons. Les fayards laissent voir le ciel et la roue du soleil. Leurs rames s’étendent au ras du sol en se balançant doucement. Nono ronronne et bâille. Elle a de beaux yeux verts et un pelage blanc égayé de taches noires.
Le soir descend, traversé de souffles. Nono songe à rentrer dans un des cartons de la grange, empli de foin. On a beau être une chatte sauvage, on apprécie néanmoins son petit confort. Et puis la patronne qui l’héberge est sympa. Elle a de bons rapports avec les autres bêtes. Nono apprend à lui faire confiance. Jusqu’à même accepter quelques caresses furtives et l’emprisonnement dans une cage en vue d’une stérilisation.
Nono a été opérée. Elle ne s’est pas montrée agressive et se réveille en douceur. Elle a le ventre rose de mercurochrome. La patronne la regarde en souriant et lui gratte le front en murmurant : « Nono, gentille petite chatte rose ! ». C’est bon de se sentir aimée, mais la liberté est la plus forte dans le cœur de Nono.
Danielle Chevalier Villejaleix
14 mai 2018


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